Axelkahn est un ténor hors du commun, presque un dieu vivant. Ses interprétations des airs d’opéras les plus périlleux sont des instants volés à l’éternité. Tout cela grâce aux biopuces que lui ont implantées les mystérieux Yuweh. Jusqu’au jour où ces greffes tombent en panne, renvoyant Axelkahn à sa condition de simple mortel. Il ne lui reste plus qu’à tenter de retrouver un Yuweh, dont la légende raconte qu’il aurait disparu au cœur des Bulbes Griffith, gigantesque artefact spatial composé de stations reliées entre elles par des filins créant une inextricable toile d’araignée. Il forme donc une troupe de théâtre aussi hétéroclite qu’attachante et se lance en quête d’une hypothétique guérison.

De l’aventure, la description d’un monde hors du commun et… du théâtre ! Rarement space opera n’aura si bien porté son nom.

Review

Ce roman nous raconte le voyage d'Axelkhan, ancien ténor à la voix d'une perfection inhumaine, à la recherche de la créature qui pourra lui rendre cette voix.
Ce voyage le fera changer, évidement, mais fera également de lui le chef d'une compagnie de théatre dans un monde particulièrement étrange, et que je me dois malheureusement de décrire un peu, tant il dépasse son rôle de décor pour devenir un élement majeur de récit.
Les bulbes Griffith sont donc un artefact, peut-être extra-terrestre, qu'on pourrait tenter de décrire comme une espèce de grappe de raisin géante ... Géante au-dela des mots puisque chaque grain a des dimensions de plusieurs dizaines de kilomètres.
Ces bulbes sont sillonés d'un réseau plus ou moins dense de câbles, sur lesquels évoluent des nacelles, et aux croisements desquels s'établissent des stations, toujours peuplées de cités franchement renfermées. Je serai en fait tenté de voir ce décor comme une tentative plutôt réussie de spatialisation de far-west : de petits îlots de civilisation, dirigés d'une main de fer par un intendant/propriétaire, au milieu de vastes espaces inhospitaliers, qui ne sont reliés à la civilisation que par d'épisodiques passages de nacelles (que je n'ai pu m'empêcher de voir comme des nacelles de téléphériques, proches dans l'esprit de l'étrange réseau de link:9782266147583.html[la cité du goufre La Cité du Gouffre] de 3520).
Et dans cet univers au far-west de pacotille, Axelkhan monte donc une troupe de théatre afin de rallier le centre des bulbes, centre semi-légendaire dans lequel est censé se trouver une créature susceptible de lui rendre sa voix.
Soyons clairs, ce but n'est en fait qu'un prétexte pour que l'auteur nous montre une multutitude de stations, de plus en plus déprimantes à mesure qu'on se rapproche du fameux centre, mais aussi, et surtout, un prétexte pour nous parler du monde magique du théatre : la pression qui pèse sur les acteurs avant l'apparition en scène, la lutte contre le temps pour écrire, mettre en scène et produire une pièce digne de ce nom, le constant équilibre entre impertinence et risque social, le tout exacerbé par cet univers où les ressources sont rares et où les pirates du sol terrifient les habitants des stations.
Il se dégage de tout ça une athmosphère où le danger rôde, dans le lointain, mais où, surtout, les costumes de scène, les dialogues de théatre, créent une espèce d'ambiance légère qui n'est peut-être pas volontaire, puisque pas du tout en harmonie avec le décor semi-désertique, ni avec l'espèce de rudesse du lieu. Ca a un côté orchestre du Titanic : c'est peut-être la merde, mais chacun essaye d'en sourire ... Enfin, encore une fois, je n'ai pas eu l'impression d'une volonté ferme de l'auteur, plus celle d'un phénomène émergent : les acteurs, aprce qu'ils jouent des comédies, créent de la joie et de la légèreté.
Au milieu de tout ça, Axelkhan me paraît complètement déboussolé, ce qui est bien normal : lui l'ancienne vedette se retrouve dans des habits crasseux à tenter d'utiliser sa compagnie de théatre pour aller là où personne ne va, à la recherche d'une vie qu'il a perdu et ne pourra certainement pas retrouver. En quelque sorte, on le voit passer à côté de sa plus audacieuse création pour une chimère qu'il aurait mieux fait d'oublier. Ce que je trouve encore plus dommage, c'est que son fameux caractère de Divo ne transparaît pas vraiment : les rares passages où il s'énerve sont rapidement passés, de même que ses éventuels caprices.
Avant d'en arriver à la conclusion de cet avis, un mot sur la conclusion de ce roman : c'est une arnaque pure et simple !
Nous pondre 300 pages d'un voyage qui aurait pu amener notre personnage au Yuweh directement depuis sa nacelle de théatre par une interception des fameux pirates (qui auraient du ne rester qu'une légende) et une espèce de passage en combinaison dans la peau d'un bulbe, tout ça pour un retournement de situation digne d'une nouvelle, eh bien je n'aime pas ça. Mais alors pas du tout. A la différence d'un roman à chute, un roman doit, à mon sens, se terminer d'une façon "digne", et pas par un lecteur qui se dise que l'auteur l'a bien roulé.
Quelque part, cette conclusion gâche pas mal la saveur d'un roman qui pouvait, sinon, être vu comme une espèce d'hommage aux artistes itinérants de l'histoire terrestre, qu'ils soient du far-west où même de la comedia del'arte. Ca reste un livre intéressant pour les amateurs de théatre dans la science-fiction, et pour ceux adeptes d'endroits étranges, habités toutefois par de sérieux abrutis dont on se demande bien ce qu'ils font encore là quand tout l'espace est à leur porte.