Sur l'île artificielle d'Anarchia, Andrew Worth, journaliste scientifique, enquête sur l'énigme de l'Univers.
Un colloque y réunit les plus grands physiciens de la planète qui doivent révéler l'équation ultime, celle qui complétera, ou encore achèvera, la physique.

Mais ce secret défie les Cultes de l'ignorance qui prolifèrent en ce milieu du XXIe siècle et qui tiennent pour impie toute révélation sur les mystères de la Création.

La plus secrète des sectes prend pour cible Violet Mosala, la plus jeune prix Nobel de l'Histoire. Et voilà Worth devenu involontairement son protecteur, alors que l'enfer se déchaîne.

Greg Egan, l'écrivain le plus intelligent de la science-fiction contemporaine, dresse ici un tableau spectaculaire de la science, de la société, des superstitions et des contradictions du milieu du nouveau siècle.

Review

link:9782253072331.html[L’énigme de l’univers L'Énigme de l'Univers] décrit donc, dans un futur à une bonne cinquantaine d’année, les aventures d’un journaliste qui va couvrir une conférence de physique théorique sur une île artificielle; Durant cette conférence doit être révélée la Théorie Du Tout, qui est sous-jacente et contient toutes les forces physiques de l’univers. Malheureusement, une secte assez étrange fera tout pour empêcher la révélation de cette théorie.

Sacré link:../authors/32699.html[Greg Egan], la première fois que j’avais lu son roman, je l’avais trouvé totallement planant et délirant. Et encore maintenant, à peine la seconde lecture terminée, j’ai encore à l’esprit des tonnes d’images, de révélations et de réflexions. Ce qui est d’autant plus étonnant que, comme pour la plupart des auteurs de hard-science, son style n’est pas des plus géniaux. Il sait écrire, mais on est assez difficilement impliqué dans les aventures du héros, alors justement que la narration à la première personne est sensée nous rapprocher de lui. En fait, dans ce roman, ça me donne plutôt l’impression d’entendre Egan me raconter directement son histoire. Peut-être est-ce dû aux innombrables disgressions censées nous expliquer le monde du héros, peut-être est-ce aussi dû à un aspect assez onirique de ce monde futur, dans lequel la violence est assez rare, et traitée, du moins aux yeux d’ Egan , comme quelque chose d’assez superflu, ce qui rend les quelques scènes “d’action” franchement inutiles.

Car finallement, ce qui intéresse Egan , ce n’est pas tant raconter une histoire que poser des hypothèses scientifiques, et utiliser son roman comme un moyen de les rendre accessibles. Que ce soit pour la construction d’Anarchia ou pour la TDT, ce sont ces éléments qui sont moteurs dans l’histoire, et non ce pauvre journaliste balotté et franchement pitoyable. Et quels moteurs d’ailleurs ! La création d’Anarchia à elle seule est un véritable morceau de bravoure, mais pour Egan ça n’est rien qu’un décor. Ce qui l’intéresse vraiment lui, c’est la TDT. On le sent bien. Et il a bien raison, puisque cette théorie est censée permettre l’explication de tout, du battement des ailes d’un oiseau à l’influence de la couleur sur le comportement (enfin, en dernière analyse, comme il le répète tout le temps). On entre là dans une autre sphère d’écriture : celle où une théorie scientifique a une influence sur notre monde méthaphysique. En effet, la vraie crainte, c’est que cette explication complète de notre univers ne laisse plus la place à aucune divinité, puisque tout serait expliqué. Et c’est là, alors que certaines sectes tentent de détruire cette TDT avant son apparition, que se révèle la première couche de délire Egan : si l’univers a été créé à partir d’un big bang, comment expliquer qu’il puisse encoder autant d’information ? L’univers n’était en effet à l’origine qu’un point de matière infinment concentré, et surtout réduit à ses composants les plus simples. Ces composants n’ont pas pu accéder à la complexité spontanément,il a bien fallu quelque part un plan de montage. Ce plan est fourni par la Clef, la personne qui explique comment tout est arrivé. Et ça, c’est franchement quelque chose de magique : alors qu’une des grandes pensées que j’ai retenu de je ne sais quel philosophe est “la carte n’est pas le territoire”, Egan suggère le contraire : expliquer l’univers et donc le cartographier, permet de le faire accéder à l’existence, et par conséquent être. Un peu comme si, en se déplaçant dans un labyrinthe, on faisait apparaitre chaque coude simplement en supposant qu’il peut apparaitre là d’après la structure logique du labyrinthe.

Et c’est là que reviennent les mèmes chers à notre NooGuru bien-aimé : cette idée d’un univers qui accède à l’existence par explication se propage comme un virus (les malades du D-Stress), alors même que l’explication n’a pas encore été trouvée. Ce qu' Egan appelle une fusion avec l’information ne serait-il pas une immersion dans la nossphère ? Je le pense. Et de plus, une immersion, puisque plutôt que d’en sortir détruit moralement ou physiquement, l’humanité en sort grandie et capable de beaucoup mieux comprendre son environnement. En fait, dans ce roman, la notion de noosphère est on ne peut plus centrale : tout le monde essaie de comprendre quelle va être l’influence de la compréhension de l’univers sur son voisin, mais personne ne peut l’imaginer.