Gardes-frontières
Du football quantique, rien que ça.
Et encore, ce football quantique n'est qu'un avant-goût de l'univers présenté. Pour être honnête, je suis à peu près certain de ne pas avoir tout compris. Parce qu'entre l'espèce de multivers fractal, les personnages virtuels immortels, et l'incapacitié à communiquer typique d'Egan, cette nouvelle était plutôt difficile à appréhender.
En fait, je n'ai pas trop saisi où ce trouvait le coeur de cette histoire : la description d'un sport étrange ? d'un univers bizarroïde ? ou une constation sur la douleur de la perte d'un être aimé ? J'en sais rien, en fait.
Les Entiers sombres
Cette nouvelle fait suite à une nouvelle précédement publiée (dont j'ai malheureusement oublié le nom) qui présentait une rupture dans le tissu des mathématiques, rupture isolant deux univers parallèles.
Dans celle-ci, la rupture est attaquée "au bazooka conceptuel", et le personnage principal tente de réparer les dégats.
Le plus gros inconvénient de cette histoire, c'est son improbabilité politique : si l'autre côté surveille à ce point le nôtre, pourquoi diable ne tente-t-il pas de discuter avec les responsables ? Au lieu de laisser la charge diplomatique à une bande de mathématiciens.
A cet important défaut près, c'est une histoire raisonnablement correcte.
Mortelles ritournelles
Rho, alors là, le fameux effet Egan commence à prendre : je décolle à moitié de ma chaise devant la puissance des idées du mec.
En gros, cette histoire décrit comment une équipe a créé un générateur de mélodies publicitaires débiles, grâce à l'imagerie fonctionnelle : ils cherchent des mélodies qui s'incrustent dans le cerveau des auditeurs, même si elles sont nulles.
Et évidement, en tirant le fil des conséquences de cette trame très simple, on obtient un résultat spectaculaire.
Le Réserviste
Sans doute la nouvelle la moins extraordinaire, puisqu'il s'agit d'une exploitation particulièrement classique du fameux "je t'ai bien eu" de bien des nouvelles. Bref ...
En gros, dans cette histoire, un type bien infâme dispose de tout un paquet de clones pour assurer son immortalité future. Il choisit un jour de faire transplanter sa mémoire dans ce clone. Mais la mémoire est-elle la personnalité ?
La question est super intéressante, mais utiliser ce genre de débat éthique pour un résultat pareil ... ben c'est gâché, je trouve. Pour tout dire, au moment où j'ai compris que cette nouvelle n'était qu'un jeu littéraire, j'ai été sincèrement déçu. je 'mattendais à quelque chose soit de plus brillant, soit de plus cruel.
Poussière
Une vraiment très bonne variation sur une partie charnière de link:9782253072249.html[La Cité des permutants]. Vous vous souvenez du moment où le personnage principal crée une cope de son esprit, et commence à 'lexécuter de façon répartie et temporellement mélangée pour "voir ce qui se passe" ? Et du fait que, curieusement, la copie reste cohérente même quans son substrat temporel déconne ? Eh bien cette nouvelle reprend exactement cette trame, en en changeant juste la fin. Et ce changement d eperspective final étend très largement les horizons du lecteur, en lui faisant comprendre à la fois ce que ressent la simulation, et ce que ressent l'auteur de cette simulation.
C'est parfaitement brillant.
Les Tapis de Wang
L'une de mes nouvelles préférées, que n'aurait sans doute pas renié
John C. Wright (celui de link:9780812519525.html[
la haute transcendance Manhattan Transfer]). On y voit une humanité transcendée pour devenir des créatures virtuelles hébergées par des superordinateurs partir à la conquête de l'espace, pour découvrir, après un voyage de quelques centaintes d'années, une planète habitée par de mystérieux tapis auto-reproducteurs.
Le meilleur arrive quand les explorateurs comprennent ce que sont ces tapis.
Je dois dire que j'ai été estomaqué par la puissance intellectuelle de cette nouvelle. Déja, la transcendance et son exploitation pour la conquête spatiale est une idée qui, si elle n'est pas exactement neuve, n'est pas non plus galvaudée. Mais alors y ajouter la découverte d'extra-terrestres de ce type, et mettant en jeu les automates cellulaires sous cette forme, c'est d'un intérêt encore supérieur.
En bonus, Egan rajoute des questionnements sur l'identité, l'amour, et l'unité d'un esprit pouvant potentiellement exister à travers des centaines d'années-lumière. Et alors ça, je peux affirmer que ça ajoute une sacrée profondeur à l'histoire.
Océanique
Je n'ai pas aimé cette histoire-là.
Des colons ayant régressé sur une planète lointaine depuis l'époque divine de la colonisation, ett ayant mis en place un dispositif de changement de sexe qui doit clairement faciliter l'égalité des sexes. Ca forme, en un sens, un joli décor.
Mais utiliser ce décor pour trouver une origine environementale à certains délires mystiques, c'est moyen. Ca donne surtout, contrairement aux autres nouvelles, un côté survolé, ou plutôt gentille histoire pour lecteurs débutants, qui m'a laissé complètement froid.
Fidélité
Peut-on rester la même personne pour toujours ? Peut-on ressentir toujours les mêmes sentiments pour un être proche ? Et, dans ce cas, est-on encore vraiment humain ?
Ces questions auraient pu donner lieu à une prise de conscience intéressante, mais peut-être à cause du postulat de départ, ça ne donne qu'une nouvelle fade, puisqu'il n'y à partir du moment où les personnages se figent, plus aucun changement possible dans le récit.
Lama
Cette histoire d'implant dans la zone du langage est extrêmement prometteuse, mais achoppe malheureusement à trouver une conclusion digne de ce nom. Parce que pour moi, ce complot organisé par des concurrents dont la morale interdit l'émergence d'une nouvelle forme de langage ressemble trop à une tentative désespérée de sortir dignement de cette histoire.
Yeyuka
On peut guérir de tout, tout dépend du prix. C'est ce qu'illustre cette histoire en remettant ce prix dans le contexte de privatisation de la médecine actuel. Du coup le prix n'est pas tant une question d'argent que de valeurs morales personnelles. Et ça, c'est bien.
Singleton
J'ai parfois l'impression que les ambitions littéraires d'49625 perdent toutes mesure. Par exemple, cette nouvelle essaye de nous présenter l'impact de la théorie des mondes quantiques multiples d'Everett sur le libre arbitre. Quel besoin avait-il d'y ajouter des questions de paternité et de statut légal des androïdes ?
Je trouve que ça diminue légèrement l'impact existentiel de cette histoire qui serait sinon fort bonne.
Oracle
Cette nouvelle reprend le personnage d'Helen de la précédente nouvelle pour la glisser dans un continuum spatio-temporel différent : l'Angleterre des années 50 où un mathématicien, que j'imagine inspiré de Turing, affronte une opposition bigote incarnée par un auteur inspiré, lui, par CS Lewis (celui des chroniques de Narnia).
Si cette nouvelle suit la précédente c'est aussi et surtout parce qu'elle reprend le concept d'unicité dans le multivers quantique. Une notion avec laquelle j'ai d'ailleurs beaucoup de mal à adhérer, mais qui a l'avantage d'être présentée de façon très didactique.
Le Continent perdu
Un récit quasiment journalistique sur ce qu'est aujourd'hui l'accueil des migrants dans les pays développés : l'humanité est bannie, la bonne foi oubliée, la misère assimilée à un mensonge. C'est moche, mais je ne trouve pas que ça ait sa place dans une intégrale raisonnée.