Fichée au milieu de l'En-Dessous comme une lèpre, Caquehan la noire brille d'une sombre lueur. On y entend tout à la fois le fracas de la technole qui régurgite les colifichets mal digérés d'une époque plus faste, les râles du moribond, les soupirs de la putain et, parfois, les rires qui s'échappent des palais. Dans cette ogresque et orgasmique Babylone se débattent Obicion l'officieur, qui enquête sur une jeune fille si sauvagement mutilée qu'on lui voit les os - des os en plastique -, Malgasta la bouffeuse de tyran, Orbarin le roi-charcutier, Meurlon l'esmoigné, Mesvolu le fraselé, ou encore Grenotte et Gourgou, les deux orphelins aux orifices bavards...
« Un morceau de bravoure, tout simplement, dont l'envoûtante beauté et la douloureuse intelligence emportent de la première à la dernière ligne. Impressionnant. » Bifrost

Authors

Review

Sur la quatrième de couvertures de ce roman, on trouve des éloges comme

« Un morceau de bravoure, tout simplement, dont l'envoûtante beauté et la douloureuse intelligence emportent de la première à la dernière ligne. Impressionnant. »

Est-ce que je suis d'accord ?

Avant de vous le dire, je vais essayer de vous résumer ce roman.
Dans un monde où le bizarre le dispute à l'horrible, différents personnages vont, pour différentes raisons, aller tenter de mettre fin au sinistre sortilège lancé par un féeur mort, mais quand même vivant.
Oui, l'intrigue de base est d'un rebattu absolument effarant. C'est donc pour ça que l'auteur a choisi de la cacher sous de multiples strates d'un décorum mélangeant le pire du romantisme noir à la plus étrange des critiques écologistes du monde moderne que j'ai vu depuis longtemps. Jugez plutôt. Le monde est découpé entre le dessus, la surface autrement dit, qui ressemble à un royaume médiéval faiblement dirigé par "le roi charcutier" (juste parce qu'il aime bien travailler la viande), et le dessous, hanté par des créatures issues des expériences d'amputation artistique d'un roi disparu depuis bien longtemps. Cette division est importante et utile dans le récit.
Ce royaume souffre par ailleurs de résurgences de technole ... pardon, de Technole. La technole, ce sont tous les objets de notre quotidien à nous qui réapparaissent. On voit par exemple une gare s'incruster dans une cathédrale moyen-âgeuse, ou alors une ligne de chemin de fer sortir toute seule de terre, avec les trains déja dessus et prêts à rouler. OU encore des téléviseurs à tube cathodique qui diffusent leurs neiges dans toutes les maisons (parce qu'évidement, il y a de l'électricité qui court un peu partout, même si elle vient d'on ne sait où). Cette technole, en revanche, n'a à mon sens qu'un rôle esthétique douteux dans l'histoire : elle ne sert qu'à mettre e place une ambiance étrange, remplie de courtisans typées XVIIème sortant de voitures, ou de gardes en armures équipés de mitrailleuses. Tiens, curieusement, ça me fait penser à la guerre des familles de Charles Stross qui nous montre les mêmes artefacts, mais dans un contexte très différent ... Et bien plus utile, je trouve.
Bien, il y a donc cette Technole, ce monde du dessus, et ce monde du dessous rempli, lui, de demi-amputés et autres hommes aux membres largement surnuméraires (mais qui est lui aussi infecté de technole).
Malheureusement, ça n'est pas tout.
Comme je l'ai dit plus haut, il y a aussi des féeurs, des espèces de magiciens capables de produire des larves qui sont l'incarnation de leurs sortilèges.
Et puis il y a encore d'autres choses ...
Comme ça fait longtemps que je n'ai pas utilisé cette métaphore, je vais la ressortir. Lire ce livre a été pour moi une épreuve. Parce qu'il était un peu comme le tableau présenté dans "le chef-d'oeuvre inachevé", cette vieille nouvelle où un artiste s'échine à poser de la peinture sur sa toile pour produire une oeuvre débordant de matière et absolument irregardable, sauf un pied absolument charmant qui dépasse de la croûte. Ici, sous l'accumulation d'horreurs à peine supportables, quelques éléments assez chouettes surnagent. Comme le monstrueux tapis humain qui, malgré son horreur, produit une impression curieusement satisfaisante. Ou certains personnages (la femme est absolument parfaite, en authentique jouisseuse).
Cependant, ça suffit pas à sauver ce roman, et pour une raison bien simple : j'ai manqué m'endormir à chaque fois que je lisais ce roman, parce que le style me rappelait une choucroute au cassoulet : bien trop lourd pour être digeste.
Et je ne dis pas ça pour être méchant. Après tout, ça a au moins dû séduire un éditeur ... Mais sur moi, l'effet a été radical : à chaque lecture, j'avais ml'impression de devoir digérer un plat bien trop lourd.

Et hélas, je dois dire que les nouvelles ajoutées dans cette édition augmentée n'ajoutent pas grand chose, puisqu'elles se contentent toutes d'illuminer différents aspects de cet univers d'une noirceur absolument inimaginable.