"Écoutez ! Allander Ap'Callaghan est mort ! Le rassembleur des clans a rejoint les bruines dont on ne revient pas ! Il n'est resté qu'un seul héritier pour toutes ses conquêtes, son frère Eylir, caché dès le plus jeune âge par sa mère dans le palais des Atlans. Mais on ne peut grandir dans l'ombre d'un géant sans être soi-même poussé un jour sur les chemins de gloire. Voici l'histoire d'Eylir Ap'Callaghan, aventurier, bandit, soldat de fortune, mendiant et roi. Voici l'histoire de l'homme qui a posé sur sa tête la couronne du Roi des Rois, a atteint le bord du monde et a réussi à faire trembler l'orgueilleuse Atlantys. Voici le portrait de l'homme qui a osé réclamer pour lui le royaume blessé."

Fresque guerrière, quête aux accents picaresques, sincère hommage aux maîtres fondateurs de l'épopée fantastique - Robert E. Howard, Fritz Leiber et J.R.R. Tolkien -, Le royaume blessé nous ouvre les portes d'un univers sensuel et dangereux, un monde écartelé entre Moyen Age barbare et Renaissance fantasmée.

Review

Il m'a fallu une semaine de réflexion, et la lecture complète de La Maison aux fenêtres de papier avant de me décider à écrire cette chronique. Mais reprenons les choses du début.

Dans ce roman, on suit les destin croisés d'Eylir Ap'Callaghan et de son chroniquer, qui par une facétie du destin, ou plutôt de l'auteur, se rencontreront après moult péripéties. On verra ainsi Eylir accompagner son frère en tant qu'héritier dans sa conquête du monde un peu folle, revenir dans des oripeaux moins glorieux de clochard, avant d'enfourcher à nouveau son cheval pour repartir dans de multiples aventures qui le mèneront plus d'une fois aux portes de la mort.

J'ai un avis très mitigé sur ce roman, sans doute dû au fait qu'il est vendu sous de fausses prémices.
En effet, l'éditeur nous parle d'un roman reprenant l'héritage de glorieux ancêtres : 1020792, H.P. Lovecraft et d'autres sont convoqués à la fête. Et si il est vrai qu'on rencontre les héros de ces deux auteurs (Conan et Fafhrd font des apparitions de guest star dans cette biographie), je n'ai absolument pas retrouvé la force de ces héros dans Eylir qui, pourtant, ne manque pas d'atouts aussi bien lors des combats qu'au près des femmes.
Et il y a à mon sens une bonne raison à ça, visible dans la carte du monde qui nous est présentée en avant-propos.
Le biographe d'Eylir n'est pas un kelte, mais un atlante (ou aspirant à l'être), et donc un homme civilisé, un fonctionnaire dans une administration impériale pour qui les pensées d'Eylir sont plus importantes que ses exploits guerriers. Et je crois que, par ce moyen, l'auteur essaye finement de nous montrer la distance pouvant éviter entre ce héros barbare et un homme civilisé. Je crois aussi (mais c'est plus personnel) que ce récit nous montre que la globalisation moderne a largement réduit les dimensions du monde, et les divergences pouvant y exister. C'est ce qui permet à mon avis à des peuples barbares d'exister face à cette civilisation atlante glorieuse. Bon, c'est sans doute prétentieux de dire ça, car notre monde contemporain héberge encore son lot de barbares et autres primitifs (attention, je ne cherche pas ici à faire de la discrimination, j'utilise simplement une échelle civilisationnelle - qui ne préjuge pas des qualités morales - que je tire de mon époque roliste, et un particulier de Runequest et Glorantha).
Ce premier point perturbe nettement la lecture. D'autant plus que le récit est assez décousu par construction : les narrations successives faites au biographe ne sont pas chronologiquement cohérentes, et l'Eylir présenté dans ces récits n'est que rarement vu par la même personne, ce qui le rend lointain, facetté par le prisme de ces témoins. Qui plus est, Eylir écume son monde, le traverse en tout sens, ce qui désoriente encore plus l'utilisateur.
Il y a pourtant une certaine forme de magie dans ce roman. Une magie qui tient réellement de l'ordre de la fantasy, c'est-à-dire la peinture d'un monde éteint depuis longtemps, dans lequel les héros ne sont plus que des ombres, qui de toute façon s'éteindront devant le phare de la raison.
Ca le rend assez intéressant, mais vraiment complexe à bien appréhender, je trouve.