T.S. Spivet est un jeune prodige de douze ans, passionné par la cartographie et les illustrations scientifiques. Un jour, le musée Smithsonian l’appelle : le très prestigieux prix Baird lui a été décerné et il est invité à venir faire un discours. À l'insu de tous, il décide alors de traverser les États-Unis dans un train de marchandises pour rejoindre Washington DC... Mais là-bas personne ne se doute qu'il n'est qu'un enfant. Muni d'un télescope, de quatre compas et des Mémoires de son arrière-arrière-grand-mère, T.S. entreprend un voyage initiatique qui lui permettra peut-être enfin de comprendre comment marche le monde... Notes, cartes et dessins se mêlent au récit avec un humour et une fantaisie irrésistibles.

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Review

Avant toute chose, je dois dire que deux raisons m'ont poussé à sortir du ghetto SF dans lequel je me sens si bien pour lire ce roman : d'abord, ma femme, qui l'a lu avant moi et me l'a vivement conseillé, et puis ce dessin d'Abstruse Goose qui est un hommage évident à ce récit.
Bref ...
Ce roman raconte le voyage du jeune (12 ans !) Tecumseh Sansonnet Spivet depuis sa ferme du fin fond du Montana jusqu'à washington pour y recevoir le prestigieux prix Baird, pour ses travaux de cartographie et d'illustration scientifique. Vous me direz que c'est louche de remettre un prix à un gamin de 12 ans, surtout quand c'est un prix destiné à un adulte. Et c'est vrai, c'est louche, surtout lorsque le jeune homme ne s'est pas inscrit pour ce prix, et que la personne censée l'en informer ne sait pas qu'il est un enfant de 12 ans.
Enfin bref, il partira donc pour un long voyage à travers les Etats-Unis, emmenant avec lui l'essentiel de son matériel scientifique, de façon à lui permettre de continuer à cartographier le monde, les cartes et les schémas de ce voyage raconté à la première personne accompagnant d'ailleurs le récit pour faire de ce livre un très bel objet (les illustrations sont toutes très belles et aident le lecteur à se perdre un peu plus dans cet étrange roman initiatique).
Vous pouvez prendre ce roman pour une initiation, parce que c'est le cas. Mais ça n'est pas que ça, je crois. J'y trouve une espèce de vision de l'amérique à mille lieues de la version cinématographique moderne. En effet, TS passe beaucoup de temps, dans son ranch ou ailleurs, à contempler (ou plutôt regarder *vraiment*) son environnement proche ou lointain, en gardant sur tout ça un oeil très enfantin, donc à la fois naïf et analytique, qui nous apprend des tonnes de choses On découvre ainsi son père, personnage né manifestement à la mauvaise époque, et ayant construit chez lui une espèce d'autel à la gloire du far-west mythique, tout ça sans que jamais ces mots ne soient prononcés directement. De la même manière, TS nous explique comment la ville s'affirme par la présence d'angles droits absoluments naturels, qui semblent chercher à proclamer à tous ses habitants que l'angle, et donc la ville, est la seule vérité. Et des tonnes d'autres vérités sur les Etats-Unis nous sont ainsi distillées au cours de ce long voyage de l'amérique la plus rurale (le fin fond du Montana) aux cercles les plus proches du pouvoir (puisqu'on aperçoit presque Bush Jr à un moment). Bon, les cercles du pouvoir, on y passe, mais rassurez-vous, ça n'intéresse pas des tonnes le jeune Spivet, qui préfère se concentrer sur des choses plus intéressantes, comme l'histoire des femmes scientifiques de sa famille : que ce soit sa mère où l'une de ses aïeules, il ne comprend pas qu'elles aient toutes deux, à un moment donné de leur carière, choisies de se mettre en retrait pour ... vivre leur vie de femme ? (je ne sais pas, hein, je crois que c'est ça, mais TS ne nous en parle pas) ce qui est sûr, c'est que ça permet à l'auteur de montrer à quel point l'exercice de la vie peut être périlleux quand on est différent (qu'on soit une femme scientifique ou un enfant ayant une occupation d'adulte). D'innombrables autres thèmes sont également effleurés dans ce roman, une infinité, peut-être même, tant les superbes notes latérales sont foisonantes et invitent à la fois à la lecture et au dilletantisme.
C'est peut-être ce qui m'a plu d'ailleurs, avec évidement le ton soigneusement distancé choisi par l'auteur. Parce que oui, ce roman m'a plu. Et je pense qu'il vous plaira si, comme moi, vous aimez les romans où l'intrigue n'est pas forcément aussi importante que le chemin de réflexion dans lequel le(s) personnage(s) s'engage(nt).