Logen Neuf-Doigts n'a plus qu'une seule bataille à livrer : celle qui l'opposera à Bethod, le roi du Nord. Vaincre son pire ennemi lui apportera-t-il enfin la paix à laquelle il aspire ? Après avoir fait l'amère expérience de la guerre, Jezal dan Luthar a tourné le dos à la vie militaire pour couler des jours heureux avec sa promise. Cependant, le prestige et les honneurs ont la vilaine habitude de se rappeler au bon souvenir d'un homme au moment où il s'y attend le moins... Et tandis que le roi de l'Union n'en finit plus d'agoniser, les paysans se révoltent et les nobles complotent. Bayaz a un plan pour sauver le monde, comme toujours, mais il comporte des risques. Le premier des Mages est-il prêt à briser la Première Loi ?

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Review

Quelle baffe !
Ce dernier tome conclut évidement d'une façon épique les deux précédents (qui n'étaient pourtant pas sans leur lot de grandeur, ou de bassesse).
Malheureusement, comme c'est le dernier tome, je ne peux pas en raconter grand chose sans dévoiler des morceaux de l'intrigue. Je vais essayer de l'écrire avec pudeur et retenue, mais ça n'est pas forcément facile.
Donc, dans ce dernier tome se conclut toute cette intrigue sur un ensemble de révélations qui jette un oeil globalement dégueulasse sur les différents personnages.
J'en veux pour exemple Logen, qui apparaissait dans les deux précédents tomes comme un guerrier peut-être berserk, mais dans l'ensemble plutôt intelligent, raisonnable et peu enclin aux actions stupides, dangereuses, ou irréfléchies. Et dans ce dernier tome, on apprend non seulement que son passé est loin, très loin d'être aussi rose qu'il n'y paraît. Et ça, c'est une sacrée baffe. J'ai, à son sujet, particulièrement apprécié le passage du combat ou son fameux "toujours vivant" fait écho à un "enfin libre" qui ne laisse aucun doute sur son point de vue sur la vie en général, et la sienne en particulier : cet homme hait manifestement ce qu'il est devenu, même si il essaye de faire bonne figure.
La transition avec Sand dan Glotka est évidente puisque lui aussi a une vie absolument merdique : il est estropié, il accomplit un boulot immonde de tortionnaire, de menace, de corruption. Et lui aussi déteste manifestement sa vie. Et pourtant, contre toute attente, il s'y accroche avec une ténacité qui n'a d'égale que les ennuis auxquels il fait face. Et toute la magie de ce dernier tome est de lui apporter un destin qui n'est clairement pas celui qu'il attendait. Pour moi, la surprise face à ce personnage que je n'ai pas aimé, mais dont j'ai apprécié la ténacité, a été totale.
Surprise aussi pour Logen, évidement. Une surprise toutefois plus mitigée puisqu'il reste dans tout ce roman un pantin ... élégant peut-être, mais un pantin malgré tout.
Surprise enfin pour Bayaz, mais d'une autre nature évidement. Dans le premier tome, on le prend simplement pour une espèce de Gandalf, ou même de Belgarrath (encore plus sympa que Gandalf, en fait), mais qui manquerait un peu de capacité à exprimer ses émotions. Eh bien je peux dire que ce dernier tome m'a, sur lui aussi, beaucoup apporté. Et quelque part, j'ai compris le choix de l'auteur d'en faire un personnage "opaque", l'un de ces personnages dont on ne perçoit pas les émotions ni les sentiments. Et si, dans la plupart des cas, le procédé peut sembler artificiel, c'est lui qui l'explique en fin de roman : comme il a vécu plus de mille ans, les être humains "normaux" ne sont plus pour lui que des lucioles à la durée de vie incroyablement faible, et qu'il faut manipuler comme un adulte manipule des fourmis : en ne souciant que peu d'en perdre quelques milliers, pour peu que le plan suive son cours.
En fait, je pourrais continuer, et détailler la manière dont les autres personnages a également subi des fortunes diverses, toujours surprenantes, et souvent désastreusement désagréables, mais ça n'est pas vraiment la peine, puisque le mot d'ordre de ce dernier tome semble réellement être "on n'a jamais ce qu'on mérite", en bien comme en mal.
Ca donne un roman extrêmement sombre, où les bonnes actions ne restent jamais impunies, pas plus que les mauvaises actions. En fait, je pense que ce cycle est le plus parfait exemple de ce que devrait être la fantasy : si le monde doit mourir parce que la magie disparaît, il serait quand même bien de montrer cette magie pour ce qu'elle est : quelque chose d'assez inhumainement dangereux, une forme de pouvoir, et donc de corruption, aussi puissante que dangereuse.
Je n'ai en fait qu'un seul regret, qui ne devrait toutefois pas vous empêcher de vous jeter dessus : il n'y a pas assez de morts dans les personnages principaux. En effet, les dangers affrontés sont spectaculairement mortels. Pourtant, seuls les seconds rôles disparaissent, alors qu'il aurait été tellement mieux de faire mourir l'un de nos héros. Mais ça n'est qu'un défaut mineur au milieu du tourbillon d'intrigue, de destruction de cette oeuvre.