2312. Le système solaire a été colonisé après que la Terre a été ravagée par les effets de la pollution. L’humanité peut compter sur les qubes, ces ordinateurs quantiques miniaturisés et parfois greffés directement au cerveau, pour l’épauler dans ses efforts de survie.
Sur Mercure, dans la cité mobile Terminateur, Swan est accablée par le décès soudain de sa grande-belle-mère Alex, un personnage très influent qui nourrissait pour l’humanité des projets soigneusement tenus secrets de tous les réseaux qubiques. Accompagnée de Wahram, un associé d’Alex, et de Genette, une inspectrice de la Police Interplanétaire, Swan part sur Io dans l’espoir d’élucider les questions qui entourent la mort suspecte de son aïeule. Elle qui faisait profession d’imaginer des mondes se retrouve bientôt au cœur d’une vaste conspiration visant à les détruire.
Kim Stanley Robinson met son imagination sans limites au service de la description d’un univers d’une vraisemblance parfaite. Avec 2312, couronné du Nebula du meilleur roman, l’auteur de la Trilogie martienne livre son grand œuvre.

Review

J'ai abordé ce roman avec une légère appréhension.
En effet, les dernières oeuvres de KS Robinson m'avaient laissé une impression mitigée : le décor mis en place était splendide, mais l'intrigue ... et surtout les personnages en fait ... n'étaient pas forcément toujours au niveau.
Alors de quoi s'agit-il ?
Eh bien d'une histoire assez complexe mêlant trois aspects très différents. Il y a d'abord une espèce de voyage autour du système solaire, largement colonisé autour des années 2300, date de l'intrigue. Il y a ensuite une intrigue complexe à base d'attentats potentiels difficilement démontrables (au début tout au moins). Il y a enfin, et c'est sans doute le plus étonnant, une authentique histoire d'amour romantique entre deux personnages que tout sépare (enfin, les deux tiers du système solaire, plutôt).
D'un coup, on comprend mieux les plus de 600 pages de cet épais roman, puisqu'en plus de ces trois axes, on trouvera dans ce roman des réflexions très profondes sur la pseudo-itérativité, la nature de l'amour et des relations humains, des questions sur ce qu'est un être humain, et tant d'autres choses qui font le sel de cette littérature.
Parce que si l'auteur n'a pas radicalement changé son style littéraire, il l'a quand même fait sacrément évoluer : les personnages sont encore lointains, mais ils ont (enfin ?) une personnalité, un ton qui les rend authentiquement identifiable. Par exemple, Swan, l'artiste qui est aussi le personnage central de ce roman, est clairement une transhumaniste extrême qui a tenté bien des choses pour comprendre ce qu'est la vie, et ses réflexions nous sont la plupart du temps suffisamment accessibles pour que d'une part on la comprenne, mais d'autre part qu'on puisse approuver ou désapprouver ses choix. Et je trouve que c'est la force des grands auteurs de réussir à rendre leurs personnages suffisamment réels pour qu'on puisse en voir les nuances, les aspects positifs comme négatifs. C'est honnêtement l'une des meilleures surprises, qui vient renforcer le côté positif de ce roman à grand spectacle.
Parce que du spectacle, il y en a : de nombreuses planètes (ou satellites) du système solaire sont en cours de terraformation, des centaines d'astéroïdes ont été transformées en habitats spatiaux mobiles. Ca m'a rappelé les bouquins de Iain M Banks (et ça, franchement, c'est un compliment). Il y a même parfois des noms assez curieusement typiques de la Culture (en plus de la variété des modes de vie).
Et puis, surtout, il y a cinquante pages de fin qui abandonnent le grand spectacle pour parler d'amour, d'engagement qui justifient, qui équilibrent complètement ce roman.
Ce complément d'humanité à l'oeuvre d'habitude austère de Robinson en fait, à mon avis, une oeuvre authentiquement majeure, plus encore que sa trilogie martienne (dont j'avais déjà fortement apprécié le fond exploratoire).